Trois années d'examen du CST

Le 19 juin 1996, le ministre de la Défense nationale m'a nommé au poste de commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications (CST) pour un mandat de trois ans et m'a chargé d'examiner les activités de l'organisme en vue de déterminer si elles sont conformes à la loi.

Comme je l'ai mentionné dans mes rapports précédents, le CST fournit au gouvernement du Canada des renseignements sur des pays étrangers, qu'il obtient en recueillant et en analysant leurs transmissions électroniques par radio, par radar ou par d'autres moyens. C'est ce qu'on appelle le renseignement électromagnétique, ou sigint. Le CST fournit en outre des avis, des conseils et des services techniques sur les moyens de protéger la sécurité des télécommunications gouvernementales et certains aspects du traitement électronique de données. On désigne cette activité sous le titre de sécurité des technologies de l'information, ou sti.

Le travail du CST est manifestement très délicat. Les renseignements qu'il recueille sur l'étranger procurent au gouvernement une information précieuse sur les questions de politique étrangère et de défense, en réponse aux priorités établies par le Cabinet en matière de renseignement.

Les trois années de mon premier mandat sont maintenant achevées. Dans ce troisième rapport annuel, qui porte sur la période prenant fin le 31 mars 1999, non seulement je traiterai des activités de l'année écoulée, mais encore je passerai en revue l'évolution de la fonction d'examen du CST depuis ma nomination en 1996.

Les connaissances et les enseignements que m'a apportés mon premier mandat contribueront à assurer d'autres progrès pendant mon deuxième mandat, que le ministre de la Défense nationale a annoncé le 15 juin 1999. Ce nouveau mandat, qui sera en vigueur jusqu'au 19 juin 2002, reconduit les éléments du premier et en renforce un qui est important, soit ma fonction relative aux plaintes. Je suis heureux de ce changement, qui correspond à des préoccupations soulevées dans mes deux rapports précédents. J'exposerai plus loin ce fait nouveau et ses incidences.

Comme je le signalais dans mon rapport de l'année dernière, je suis satisfait des ressources mises à ma disposition et de l'accès que j'ai au CST. Je dispose, pour m'acquitter de mes activités d'examen, de deux employés à plein temps et de plusieurs experts engagés par contrat. Mes opinions au sujet du CST se fondent non seulement sur mes propres observations, mais aussi sur le travail ardu de personnes qui connaissent la communauté du renseignement ainsi que la technologie complexe qui fait partie de son contexte quotidien.

Coup d'œil rétrospectif sur le premier mandat

Mon mandat initial détaillé, établi par décret en 1996 en vertu de la Loi sur les enquêtes, était le suivant :

Le texte du décret est reproduit à l'annexe A du présent rapport.

Comme on peut le supposer, j'en sais beaucoup plus long au sujet du CST que lorsque j'ai assumé ma charge il y a trois ans. À mesure que mon personnel et moi-même avons appris plus de choses, nous avons demandé des renseignements plus détaillés aux responsables du CST. Au moyen de nos questions, nous continuons de scruter de façon approfondie des affaires liées à la légalité des activités du CST. Nous attendons et recevons en retour des explications de plus en plus détaillées que nous étudions dans chaque cas afin de déterminer s'il existe une continuité logique.

Au cours de mon premier mandat, j'ai examiné la légalité des activités du CST sous plusieurs angles. J'avais décidé au début de me concentrer sur les mesures de contrôle et de responsabilisation en place au CST. Par exemple, j'ai constaté avec plaisir que l'équipe de la haute direction de l'organisme comprenait des conseillers juridiques. Ceux-ci, affectés au CST par le ministère de la Justice, donnent des avis sur la légalité des activités présentes et prévues de l'organisme et prennent une part importante à ses décisions. J'ai en outre constaté que le CST est soumis à l'examen indépendant des tribunaux, de la Commission canadienne des droits de la personne, du commissaire à la protection de la vie privée, du commissaire à l'information, du commissaire aux langues officielles et du vérificateur général.

J'ai aussi examiné la structure de rapports du CST. Au Parlement, le ministre de la Défense nationale est comptable de toutes les activités de l'organisme. Il est appuyé par deux sous-ministres, soit le sous-ministre de la Défense nationale pour les questions administratives et le sous-secrétaire du Cabinet (Sécurité et Renseignement), du Bureau du Conseil privé, pour ce qui est de la politique et des opérations.

J'ai ensuite examiné les politiques et méthodes internes du CST, les processus établis pour les réviser et les améliorer, et les programmes prévus pour former les employés à leur sujet. Dans un organisme comme le CST, qui exerce son activité sans cadre législatif dans un domaine très délicat, les politiques et méthodes propres à renforcer un comportement conforme à la loi sont essentielles. Les efforts déployés par l'organisme pour améliorer constamment ses politiques et ses méthodes et faire en sorte que les employés les connaissent et s'y conforment sont tout aussi importants.

Mon personnel a par ailleurs élaboré et raffiné des procédés afin d'examiner et de vérifier les fonds de renseignements du CST pour s'assurer que ceux-ci contiennent seulement les renseignements que le CST est autorisé à conserver. Ce programme de vérification est décrit plus en détail plus loin.

Technologie, protection de la vie privée et examen

Le succès des travaux de renseignement électromagnétique du CST repose sur une technologie sophistiquée. Cela pose des défis à l'organisme. En effet, d'une part, il œuvre dans un domaine où la technologie évolue rapidement, de sorte qu'il doit mettre constamment ses moyens techniques à niveau afin de répondre aux besoins du gouvernement en matière de renseignements sur l'étranger. D'autre part, la rapidité de l'évolution technologique lui présente un défi particulier pour ce qui est de protéger les droits des Canadiens, car les nouvelles technologies peuvent accroître ses moyens d'action.

Je sais que le degré de perfectionnement de la technologie du CST a amené certaines personnes à s'interroger sur sa capacité d'intercepter les communications de Canadiens. Toutefois, j'ai constaté que le moteur des activités du CST est son mandat de répondre aux besoins de renseignements sur l'étranger établis par le gouvernement du Canada, et non pas les capacités de la technologie qu'il met en œuvre. Mon examen et mon analyse révèlent qu'il n'utilise pas sa technologie pour cibler des communications canadiennes. Conformément à la politique du gouvernement, le CST déploie des efforts considérables pour éviter de recueillir des communications canadiennes.

On peut, bien sûr, utiliser la technologie pour protéger la vie privée. À mesure que les moyens technologiques du CST s'améliorent, sa capacité d'éviter de recueillir des renseignements qui ne cadrent pas avec son mandat touchant les renseignements sur l'étranger augmente. Les nouvelles technologies peuvent l'aider à améliorer sa collecte de renseignements et soutenir en même temps la légalité de ses activités. Au cours des mois et des années à venir, j'entends continuer à examiner soigneusement l'utilisation que le CST fait de la technologie.

L'effet de l'examen sur le CST

Dans mon dernier rapport, j'ai fait allusion à l'opinion générale selon laquelle l'observation suscite le changement. Autrement dit, la présence même, dans une organisation, de personnes de l'extérieur qui observent son rendement peut accroître l'engagement interne à améliorer celui-ci.

Dans le cas d'un organisme de renseignement, le rendement réel dépend des valeurs professées par cet organisme, des activités auxquelles il s'adonne pour atteindre les résultats, et de son engagement à assumer la responsabilité à la fois de ses valeurs et de ses résultats.

Au cours de mon premier mandat, j'ai constaté que la maxime selon laquelle l'observation suscite le changement s'applique au CST. Dans mes évaluations de l'organisme, j'ai examiné non seulement ses activités, mais aussi ses valeurs, telles qu'elles se traduisent dans ses politiques et ses méthodes. Je peux confirmer que l'existence d'une fonction d'examen contribue au mouvement d'amélioration et sert à rappeler aux employés les valeurs que le CST s'est données.

Autre avantage de la fonction d'examen : les employés du CST, sachant que des observateurs indépendants ont informé le public de la légalité de ses activités, ont été à même d'aborder leur travail avec plus d'assurance et, par conséquent, de mieux servir le gouvernement du Canada.

Ce sont là, à mon sens, des arguments importants en faveur de l'instauration d'un mécanisme d'examen permanent.

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