Observations préliminaires devant le Comité spécial sénatorial sur la Teneur du projet de loi C-36

Observations préliminaires de l'honorable Claude Bisson

Commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications devant le Comité spécial sénatorial sur la Teneur du projet de loi C-36

Ottawa
Le 22 octobre 2001

Observations de l'honorable Claude Bisson, commissaire du CST

Madame la Présidente, honorables sénateurs,

Je suis ravi de cette occasion qui m'est donnée de prendre la parole devant vous ce soir, en tant que commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications. Je suis accompagné aujourd'hui par Madame Joanne Weeks, secrétaire de la Commission, qui est responsable des opérations de mon bureau. Une version écrite de mes observations préliminaires a été remise au greffier du Comité, à votre intention.

Je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui devant ce comité. Mes remarques porteront sur les parties du projet de loi anti-terroriste qui traitent du Centre de la sécurité des télécommunications et du rôle du commissaire du CST. Il me fera plaisir de répondre ensuite à vos questions.

Je me limiterai, tant dans mes observations préliminaires que dans mes réponses à vos questions, aux parties du projet de loi qui concernent le CST et le commissaire du CST. Je n'ai pas eu véritablement l'occasion de me pencher sur les autres parties du projet de loi et je ne dispose pas d'assez d'information à leur sujet pour émettre un avis mûrement réfléchi.

Je suis parfaitement au courant des préoccupations exprimées par d'autres personnes quant à l'élaboration hâtive de ce texte de loi, et au risque qu'en cherchant à renforcer la capacité de notre pays de contrer le danger réel que posent les terroristes, il ne tombe dans l'excès. Votre rôle qui consiste à examiner les nombreuses mesures proposées – étant donné ce que nous savons être une menace mortelle et urgente – est extrêmement important.

On a demandé aux rédacteurs de ce projet de loi de prendre en compte l'équilibre essentiel qui doit exister entre, d'une part, les besoins de l'État en matière de collecte d'information pour protéger ses citoyens et, d'autre part, les droits individuels de ces citoyens en matière de liberté et de respect de la vie privée. Je sais que l'un des objectifs déclarés de ce comité est d'explorer la protection des droits de la personne et des libertés civiles dans le cadre de l'application de cette Loi, et je vous souhaite de mener des débats fructueux.

Vous devez être en partie soulagés de savoir que, bien que ce texte ait été rédigé en toute urgence, les parties qui traitent du CST et du commissaire du CST ont profité d'années d'examen et de discussions menés au sein du gouvernement.

Dès 1990, un comité spécial de la Chambre des communes examinant la Loi sur le SCRS recommandait que le Parlement institue le CST par un acte de loi. Le gouvernement a décidé à l'époque de ne pas adopter cette recommandation, mais il a indiqué qu'il « envisageait de donner au ministre de la Défense nationale des capacités supplémentaires pour l'examen du CST ». Ceci a éventuellement débouché, en 1996, sur ma nomination en tant que premier commissaire du CST.

La question d'une loi instituant le CST a refait surface en 1996, alors que le commissaire à la protection de la vie privée effectuait une vérification de la conformité du CST. Le commissaire concluait que, dans la mesure où sa vérification pouvait en rendre compte, le CST exerçait ses activités en conformité avec la Loi sur la protection des renseignements personnels et avec les principes régissant des pratiques équitables de traitement de l'information. Toutefois, il recommandait également l'adoption d'une loi habilitante pour le CST.

Plus tard au cours de la même année, le vérificateur général a déposé un rapport sur le milieu du renseignement canadien, dans lequel il exhortait le gouvernement à examiner les avantages qu'offrirait un cadre législatif approprié pour le CST. Il a réitéré cet avis en 1998, dans un bref rapport de suivi.

De même, en 1999, le Comité spécial du Sénat sur la sécurité et les services du renseignement présidé par le sénateur Kelly, recommandait que le CST soit doté de sa propre loi du Parlement et que le texte de la loi prévoie l'existence d'un organe de surveillance du CST qui soit distinct et permanent.

Dans chacun des quatre rapports annuels que j'ai présentés au ministre de la Défense nationale depuis ma nomination, j'ai soulevé la question d'une loi sur le CST. J'ai indiqué, dans mes rapports annuels et à d'autres occasions, qu'à mon avis une loi constituerait une mesure opportune qui établirait le CST sur une base solide, en définissant son mandat ainsi que ses pouvoirs et ses rapports avec le Parlement, le gouvernement et le ministre de la Défense nationale. Je suis donc ravi que l'on envisage aujourd'hui l'adoption d'une telle loi, bien que je regrette profondément les événements tragiques qui en ont fait une priorité.

J'aimerais mentionner que, depuis sa création en 1946, le CST a très bien fonctionné sans texte de loi. Au fil des décennies, son utilité pour le gouvernement a assuré sa pérennité, malgré l'absence de base législative. Toutefois, l'adoption d'une loi permettra de faire en sorte que l'organisme continue de répondre aux besoins du Canada de manière plus transparente, et il y a lieu de s'en féliciter.

Dans mes rapports annuels, j'ai signalé certaines questions qui doivent être prises en considération lors de la rédaction d'une loi sur le CST.

Par exemple, j'ai fait remarquer que l'évolution rapide qui caractérise les domaines de la sécurité, du renseignement et de la technologie représenterait un défi pour les rédacteurs. La loi sur le CST doit être suffisamment souple pour que l'évolution de la technologie ou des méthodes de renseignement ne la rende pas caduque. Plutôt que d'énumérer en détail des règles concernant, par exemple, l'utilisation de technologies précises, cette loi devrait faire ressortir les rôles et les responsabilités, et les grands principes. Je crois que le projet de loi que vous examinez atteint cet objectif.

Bien sûr, j'ai aussi profondément réfléchi ces dernières années à ce que seraient les moyens les plus efficaces d'examen du CST.

Comme vous le savez bien, le mandat du CST est la collecte de renseignements étrangers pour le gouvernement du Canada et, en vertu du texte de loi proposé, ce mandat sera maintenu.

En vertu du projet de loi C-36, le ministre de la Défense nationale peut autoriser le CST à intercepter des communications privées dans le seul but d'obtenir des renseignements de source étrangère, dans les conditions suivantes :

Depuis ma nomination à titre de commissaire du CST en juin 1996, j'ai acquis une connaissance des activités et des méthodes de collecte de renseignements de l'organisme. Je me suis aussi penché sur les politiques et procédures qui le gouvernent. Mes activités d'examen ont notamment consisté à repérer les mécanismes que le CST a mis en place pour protéger la vie privée des Canadiens et à en déterminer la pertinence compte tenu des circonstances. À ce jour, je suis satisfait. J'ai toutefois avisé le CST que je continuerais d'examiner comment il utilise les nouvelles technologies pour améliorer ses méthodes de protection de la vie privée. Je peux vous assurer que je compte demeurer vigilant.

Madame la Présidente, j'ai terminé mes observations préliminaires. Je serai heureux, ainsi que Madame Weeks, de répondre à vos questions.

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